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Va vers la lumière, mon fils

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PRÉFACE (de Daniel Bilalian)

Comment ça va? Une expression banale que l’on entend plusieurs dizaines de fois par jour, et à laquelle on répond toujours par un « Très bien, merci », même si cela n’est pas le cas.

Ce jour arriva pour la famille du petit Ben. Heureusement, cet après-midi-là, personne ne leur posa la question rituelle: Comment ça va ? Sinon, ils auraient répondu: « Ça ne va pas. Notre petit garçon de 7 ans est atteint du sida et il va mourir. » En fait, ils n’auraient sans doute pas eu la force de répondre.

C’est une terrible histoire que nous racontent les parents de cet enfant hémophile contaminé par le virus encore aujourd’hui mortel à plus ou moins brève échéance. Dans ce livre témoignage, ils nous confient ce que fut leur vie pendant ces deux années d’agonie ; une famille américaine comme beaucoup d’autres, heureuse, autant que l’on peut l’être. Plusieurs enfants, et puis soudain, le drame.

Le jour où la maman a appris que son enfant était condamné, son regard s’est arrêté sur un coin de moquette de la salle d’attente de l’hôpital, sur une poignée de porte ou sur le bout de ses chaussures. Lorsqu’un drame survient, contrairement aux héros de roman ou de cinéma, on n’est pas à la hauteur, les phrases, les gestes ne sont pas à la dimension de l’événement. On pense à tout et à rien à la fois, et l’on se demande banalement pourquoi nous, pourquoi lui, pourquoi un enfant innocent. Dans ce récit, on suit jour après jour, heure par heure, minute par minute, l’avancée de la maladie et la vie qui continue. Et l’on se dit que chaque jour, il nous arrive peut-être de croiser des hommes, des femmes, des enfants condamnés à mort et qui malgré tout ne s’arrêtent pas de vivre aussitôt. Ils se lavent, ils s’habillent, ils parlent de choses et d’autres, par habitude. Le papa et la maman de Ben, comme tous les parents du monde, sont d’abord incrédules avant d’être désespérés.

On peut expliquer à un homme, à une femme, à des adultes qu’ils vont mourir, car à partir d’un certain âge on pense à la fin de sa vie. Mais un enfant de 8 ans est immortel. Le mot « mort » ne représente rien pour lui. Et c’est pour cette raison que jusqu’à la fin, le petit Ben se montrera plus raisonnable et plus lucide que « les grands » qui l’entourent. Pour lui, la mort n’est pas la fin de la vie mais peut-être le sommeil qui va l’empêcher de souffrir.

Ce document, au-delà du drame personnel, est aussi un témoignage intéressant sur l’attitude des autres par rapport à ceux qui sont atteints de ce mal qui sème la terreur. Le sida, cette peste du xx° siècle, fait peur et provoque des réactions irraisonnées. Les portes de l’école se ferment devant le petit Ben, ses amis le rejettens — avant de lui revenir parfois. Mais peut-on blâmer, sans s’interroger, ceux qui agissent ainsi ?

Tout au long de cette attente terrible de l’inexorable, nous suivons pas à pas la vie quotidienne d’une famille qui, du mieux qu’elle peut, fait en sorte que l’existence quotidienne ne soit pas un cauchemar. Quelques semaines avant la fin, les bougies du gâteau du neuvième anniversaire de Ben lui donnent encore quelques instants de bonheur. Mais dans cette vie partagée avec un petit condamné à mort, les moments de rancune sont perpétuellement à fleur de peau. Comme certains survivants des camps de la mort, cette famille américaine aurait pu dire — elle l’a peut-être pensé — que Dieu n’existe pas, qu’il ne permettrait pas cela… Au contraire, ce papa et cette maman essayent d’accompagner leur enfant vers la mort en lui laissant espérer qu’au bout du tunnel, il y a un mince filet de lumière qui le guidera vers l’au-delà.

Pour autant, le courage de ce couple américain ne nous est pas livré comme un exemple. Chacun, face au malheur, réagit à sa façon, simplement. Cet homme et cette femme nous confessent ce que fut leur vie pendant ces deux années. Ils ne nous cachent rien de leurs instants dramatiques, mais aussi de leurs rires égoïstes, qui les ont aidés à tenir.

L’expérience des uns ne sert pas aux autres, sinon que d’erreurs évitées! De même, le malheur des uns n’aide pas les autres. Mais il permet sans doute de mieux comprendre les ressources de l’Âme humaine.

À 9 ans et quelques semaines, Ben est mort dans les bras de sa mère, dans un geste maternel et dérisoire à la fois, mais que pouvait-elle faire d’autre ?

Daniel Bilalian

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